Jésus

Jésus

Title: Jsus Author: Jean Aicard Release Date: September 23, 2022 [EBook #69031] Language: French Original Publication: FR: , France: Ernest Flammarion,1911. Credits: Laurent Vogel (This book was produced from images made available by the HathiTrust Digital Library.) Avant daller dormir prs de toi dans la terre, Jai voulu, pour ta joie, crire ce Mystre, Tel un ptre ignorant, sur un morceau de bois, De son couteau grossier sculpte un Jsus en croix, Et jai fait ce travail, o se complut mon me, Grand-pre, en souvenir de cette belle flamme Que mon regard surprit vivante au fond du tien, Quand, tourn vers lEspoir, tu mourus en chrtien. Vers Emmas, lheure o la clart finit, Lentement, ils devaient marcher soixante stades, Deux hommes cheminaient, causant en camarades Une Ombre, qui venait derrire eux, les joignit. Disciples de Jsus, ils parlaient de leur matre Que Magdeleine et Jean croyaient ressuscit. Une Ombre maintenant marchait leur ct. Ctait Jsus, mais rien ne le faisait connatre. Il leur dit: De quoi donc parliez-vous en marchant? Et pourquoi semblez-vous si tristes, pauvres hommes? Tristes, lui dirent-ils, tristes, oui, nous le sommes! Et le son de leur voix tait grave et touchant. Es-tu donc tellement tranger la Ville, Que tu ne saches pas notre malheur rcent? Jsus de Nazareth, un prophte puissant, Depuis trois jours peine est mort dune mort vile. Les sacrificateurs, les docteurs de la Loi, Nos magistrats, lont tous condamn. Quelle honte Mais, toi, reste avec nous parce que la nuit monte Inconnu, nous aimons causer avec toi. Or, depuis un instant, leurs paroles funbres Retombaient sur leur cur, dans la nuit, lourdement Un deuil affreux venait sur eux, du firmament; En eux, comme autour deux, tout ntait que tnbres Et dans labandon triste o les laissait le jour, Vainement ils cherchaient, au ciel vide, une toile; Ils voyaient ltranger comme travers un voile, Mais ils sentaient en lui comme un attrait damour. Sil sloignait un peu, leur cur, empli de troubles, Aussitt amoindri, dfaillait et pleurait Sil se rapprochait deux, tout contents en secret, Ils se sentaient monter au cur des forces doubles. Ctait alors en eux comme un flot de chaleur, Le doux rayonnement dune intime lumire; Ils ne comprenaient plus leur dtresse premire Ni pourquoi le chemin leur devenait meilleur. Et les deux plerins que le Spectre accompagne Rptaient Celui que lon ne peut pas voir: Reste avec nous, Seigneur, parce que cest le soir Et notre angoisse crot dans la nuit qui nous gagne. Or, Christ, ressuscit depuis dix-huit cents ans, Vient de mourir encor, mais dune mort tout autre; Et dans ce sicle obscur il a plus dun aptre Et plus dun plerin dans les doutes prsents. Nos Scribes, attachs la lettre du Livre, Par sottise les uns, dautres par intrt, Nont plus ni les rigueurs ni lamour quIl aurait; Mais dans la nuit qui vient nous le sentons revivre. Il vit. La nuit immense a beau venir sur nous, Tnbres de lesprit qui nie et qui calcule, Nous avons beau sentir, dans laffreux crpuscule, Dfaillir la fois nos curs et nos genoux; Chacun de nous revoit, dans la nuit de son me Ce fantme divin, pur esprit, noble chair, Qui nous a fait tout homme et tout enfant plus cher, Notre mre plus tendre et plus douce la femme. Chacun de nous le voit, le doux spectre voil, Luire ineffablement dans lombre intrieure, Dans lombre aussi qui tombe, en cette mauvaise heure Du vide qui, jadis, fut un ciel toil. A son charme infini qui de nous se drobe? Ignorant ou savant, qui donc est bon sans lui? Tous les astres sont morts qui pour dautres ont lui, Mais nous sommes frls des lueurs de sa robe. L-bas, derrire nous, laffreuse Ville en deuil, Dressant sur le ciel rouge, en noir, les toits du Temple, La hautaine cit du crime sans exemple, Nous envoie en rumeurs les cris de son orgueil. Cest un bruit dor tintant sous de hauts pristyles, Cest lappel des soldats veillant sur les remparts; Et le monde branl craque de toutes parts Sous le riche oublieux des mendiants hostiles Mais en nous, contre nous, nous avons un recours, Cest la bont, cest la piti, cest lvangile: Nous sentons tout le reste incertain et fragile. Le ciel est vide et noir; et cest la fin des jours; Mais le spectre dun Dieu marche encor dans nos routes Avec sa forme humaine au sens mystrieux. Nos chemins effacs sclairent de ses yeux, Et sa blancheur nous guide travers tous les doutes. Oh! puisque la nuit monte au ciel ensanglant, Reste avec nous, Seigneur, ne nous quitte plus, reste! Soutiens notre chair faible, fantme cleste, Sur tout notre nant seule ralit! Ta force heureuse rentre en notre me plaintive Et mme les tombeaux sont clairs de tes rayons Toi par qui nous aimons, toi par qui nous voyons, Reste avec nous, Seigneur, parce que lombre arrive! Seigneur, nous avons soif; Seigneur, nous avons faim Que notre me expirante avec toi communie A la table o sassied la Fatigue infinie, Nous te reconnatrons quand tu rompras le pain. Reste avec nous, Seigneur, pour ltape dernire; De grce, entre avec nous dans lauberge des soirs Le Temple et ses flambeaux parfums dencensoirs Sont moins doux que ladieu de ta sourde lumire. Les vallons sont combls par lombre des grands monts Le sicle va finir dans une angoisse immense; Nous avons peur et froid dans la mort qui commence Reste avec nous, Seigneur, parce que nous taimons. ......Buy Now (To Read More)

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Ebook Number: 69031
Author: Aicard, Jean
Release Date: Sep 23, 2022
Format: eBook
Language: French
Publisher: Ernest Flammarion
Publication Date: 1911
Publisher Country: France