L'Illustration, No. 0036, 4 Novembre 1843

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L'Illustration, No. 0036, 4 Novembre 1843 N 36. Vol. II.--SAMEDI 4 NOVEMBRE 1843. Bureaux, rue de Seine,...
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N 36. Vol. II.--SAMEDI 4 NOVEMBRE 1843. Bureaux, rue de Seine, 33. Ab. pour Paris.--3 mois, 8 fr.--6 mois. 16 fr.--Un an, 30 fr. prix du chaque N. 75 c.--La collection mensuelle br., 2 fr. 75. Ab. pour les Dp.--3 mois, 9 fr.--6 mois, 17 fr.--Un an, 32 fr. Pour l'tranger. -- 10 -- 20 -- 40 SOMMAIRE. Une visite au pote Jasmin. Portrait et Maison de Jasmin; Coupe et Laurier d'or donns Jasmin.--Histoire de la Semaine.--Le Page, romance. Paroles de M. E. de Lonlay; musique de M. Donizetti Gravure.--Thtre-Italien. Belisario, Portrait de Fornasari.--Courrier de Paris. Madame Paradol; le Prote anguillard.--Les Vendanges. Sept Gravures.--Romanciers contemporains. Charles Dickens. Martin fait de nouvelles connaissances et Mark un nouvel ami. Gravure.--Margherita Pusterla. Roman de M. Csar Cant. Chapitre XV, le Pre et le Fils; chapitre XVI, l'Exil, douze Gravures.--Annonces.--Modes. Gravure.--Amusements des Sciences. Gravure.--Rbus. Une visite au pote Jasmin. Agen, cette ville ancienne, situe au cur de la Gascogne, sur les rives admirables d'un fleuve qui a besoin d'tre plus vant; Agen, avec sa cathdrale byzantine, sa maison de Montluc, sa promenade superbe du Gravier, ses ponts si beaux sur la Garonne, o vient s'ajouter un dernier miracle de l'art, le pont-aqueduc; Agen cependant, aux yeux du voyageur, la pense mme de l'Agenois et de l'habitant du Midi, n'a qu'une seule merveille, une au moins qui absorbe toutes les autres: c'est un coiffeur-pote, un homme de gnie tout bonnement, qui rase et coiffe; mais cet homme est l'homme du Midi. Jasmin. Il y a bien aussi, dans cette France mridionale, un autre homme qui, par sa posie et sa condition, a quelque similitude avec Jasmin; c'est Reboul, le boulanger de Nmes. Mais cette circonstance n'est qu'apparente; Reboul n'est homme du Midi et boulanger que par hasard; ce n'est pas l sa condition relle, C'est un littrateur d'esprit et, lgant, comme tant d'autres; c'est un des mieux placs dans cette lgion d'astres qui gravitent, en le refltant, autour de ce soleil qui se nomme Lamartine. Mais n'allez pas lui demander des vers en patois; sa langue est celle de Paris; il en connat tous les secrets, toutes les formes mlancoliques et harmonieuses; il vous variera avec charme cet ternel thme de douleur, de religion et d'amour qui, depuis 1820, a fait germer deux mille volumes de vers. Ce qui le distingue cependant et le met hors ligne, c'est qu'il est boulanger; mais ceci est le secondaire et l'accident de sa vie.--Une dame du grand monde, entendant parler des succs diplomatiques et des tableaux de Rubens, disait nonchalamment: Ce Rubens tait donc un ambassadeur qui s'amusait peindre?--Eh! non pas, madame, rpondit Van-Dyck: c'tait un peintre qui s'amusait tre ambassadeur. Reboul est un homme de beaucoup d'esprit qui s'amuse tre boulanger. Tel n'est pas Jasmin. L, au contraire, est une nature suprieure, vierge, originale, un gnie qui n'a d'autre source que dans lui-mme, et qui s'est fait un lit et des rives pour y verser et y promener une posie trange et inconnue. C'est un homme qui, parlant une langue sur de celle du Dante, mais aujourd'hui ddaigne et presque proscrite, s'en est hardiment empar, l'a pure, agrandie et fixe. Cette langue allait mourir, disaient-ils, et lui la ressuscite et la baptise au nom de la posie et du gnie; et ses pomes, qui ne peuvent prir, entranent avec eux l'idiome dans leur immortalit. Quel est donc cet homme extraordinaire devenu ainsi la gloire et presque l'idole du midi de la France? Il nous serait facile de rpondre cette demande en analysant et pillant au besoin les excellents et charmants articles publis dj sur lui par MM. Nodier, Sainte-Beuve, Lavergne et tant d'autres; mais peut-tre voudra-t-on bien prfrer ce transvasement des penses et des phrases d'autrui des impressions personnelles et toutes rcentes. Je vais donc raconter avec une vrit simple la visite que j'ai faite il y a peu de jours Jasmin. Sur le bateau vapeur qui mne de Bordeaux Agen, tous les hommes du Midi m'avaient d'avance rpondu la question que j'allais leur faire; Jasmin! vous trouverez sa boutique sur la promenade, prs du pont suspendu. Au-dessus est crit: Jasmin, coiffeur des jeunes gens. Au reste, tout le monde vous l'indiquera. M. de Talleyrand, qui l'on demandait l'adresse de la princesse de Vaudemont, rpondait: Demandez-la au premier pauvre que vous rencontrerez dans la rue. En Gascogne, tout le monde connat la demeure du pote, comme Paris tous les pauvres savaient o vivait la bienfaisance. Arriv Agen, et devant cette boutique clbre, j'en examinai curieusement l'aspect extrieur. Les boutiques des coiffeurs de la rue Saint-Marcel ou du Gros-Caillou sont assurment plus splendides que celle du pote. Les bustes traditionnels en cire ou en carton ne se voient mme pas sur la devanture vitre et troite, qui se couronne par une planche avec ces mots: Jasmin, coiffeur des jeunes gens; au-dessus est un seul tage, avec une seule croise, puis le toit. D'ailleurs dans la montre rien ne rvle l'auteur; pas un livre, pas une affiche; des objets de toilette parlent pour le seul coiffeur. J'entrai dans la boutique. Elle est troite et petite; trois chaises et un fauteuil en paille la meublent; tout autour, des armoires vitres regorgent de perruques, de flacons, de peignes et de parfumerie; une de ces armoires, la plus obscure, contient quelques livres: cot d'elle, dans le mme coin, un petit guridon est charg de journaux, de lettres, de livres: c'est le coin du pote. La femme de Jasmin tait alors seule. Mon mari va descendre, dit-elle. Quelques instants aprs entrait dans la boutique un homme de quarante-cinq ans, de taille moyenne, mais vigoureux et trapu, la tte forte, le teint anim, la lvre paisse, les cheveux crpus, les yeux pleins de feu, une physionomie que plus tard je vis bien tre aussi mobile qu'nergique. Il tait vtu d'un paletot dont les soieries et la ganse taient fort fanes. C'tait Jasmin. Maison de Jasmin. Il me lit asseoir sur le fauteuil de paille, et lui-mme prit une chaise auprs de sa femme.. Cette double condition de pote et de coiffeur embarrassait ma dmarche, et j'attaquai d'abord le coiffeur. Monsieur, lui dis-je, je, dne au chteau de la Garde, quatre lieues d'ici. Je ne sais si j'aurai le temps de faire ma barbe avant l'heure du dner.... et je viens... Jasmin me rpondit qu'il ne lui paraissait pas qu'il y et besoin de me raser... mais en tudiant un petit froncement presque imperceptible dans sa bouche et ses yeux, je lui dis de suite que ceci n'tait qu'un prtexte, et que le vritable but de ma dmarche tait de venir trouver l'homme minent et de connatre le pote. Alors la physionomie de Jasmin devint tout coup brlante et splendide d'animation, de froide et indiffrente qu'elle tait. Savez-vous ma langue? s'cria-t-il en changeant de chaise et en se rapprochant de moi.--Non.--Ah! mon Dieu, quel malheur! mais c'est gal, j'essaierai de vous la faire sentir. Et tout coup, sans autre prologue, le pote, avec une chaleur d'esprit et un enthousiasme dont on ne peut rendre compte, dans un excellent langage franais d'ailleurs, se livrait une improvisation saisissante et une thorie de son art de pote et du gnie de sa langue, dont je regrette; bien de ne pouvoir donner ici une ide. Quel bonheur pour moi, disait-il, de m'tre servi de la langue du mon pays! quoique vieille, elle est vierge; aucun antcdent, pour ainsi dire, aucune rgle, aucune de ces purations nervantes ne lui commandent. Elle est libre, fire, neuve dans la littrature, et elle peut s'enrichir sans contrle des paroles de ses surs qui nous entourent, des langues espagnole, italienne, et de toutes celles du Midi. C'est ce qui fait mon bonheur, et peut-tre ma force. Votre langue, au contraire, quelle est-elle? Enerve de rgles, d'entraves, de liens de got et de purisme, puise par la multitude et la fcondit des auteurs, elle est vieille et caduque. C'est une langue admirable, sans doute, pour la vie de la nation; mais c'est une langue tue pour la posie.--Aussi on dit que la posie meurt en France; c'est parce que la langue potique meurt qu'on le dit; car la posie elle-mme peut-elle mourir? Et soyez, attentif ceci: examinons la manire de Victor Hugo? Qu'a-t-il cherch, ce grand pote, si ce n'est la langue qui lui manque. Remarquez qu'il a voulu l'lectriser et la ressusciter, pour ainsi dire, par la bizarre recherche des mots et des formes, par le grandiose quelquefois exagr des ides. Le voyez-vous au milieu de cette tourmente de son gnie? D'o vient cette agitation? D'est que l'instrument lui manque; sa langue use et morte lui rpugne; il veut se faire une langue nouvelle dans la sienne. Moi, au contraire, j'ai la mienne, comme je vous le disais, pure, vierge, hardie, vive, le bouquet de fleurs d'oranger au ct; et c'est moi, moi seul jusqu'ici qui le bon Dieu a accord de la mener l'autel. Avec une pareille libert et un tel bonheur, la posie devient facile et nave comme elle doit tre; le vrai et le simple sont seuls touchants et potiques. Aussi tous mes efforts tendent l.--Je ne dis pas l'ternel, le Dieu tout-puissant, etc., mais le boun Diou, et l'ide de Dieu n'en arrive-t-elle pas au cur plus vive et plus tendre? O est la plus belle posie, la vraie, si ce n'est dans ces vers de Branger? Et Jasmin, se levant, me dit avec un art prodigieux et les inflexions d'un comdien consomm ces vers: Mes enfants, dans ce village, Suivi des rois, il passa; Voil bien longtemps de a: Je venais d'entrer en mnage. A pied grimpant le coteau O, pour voir, je m'tais mise, Il avait petit chapeau Avec redingote grise, Prs de lui je me troublai. Il me dit: Bonjour, ma chre! Bonjour, ma chre! --Il vous a parl, grand'mre! Il vous a parl! Vous allez entendre mes vers, continua-t-il; vous verrez, vous verrez. C'est la nature, la douleur, la joie comme Dieu les fait. Alors il se leva, et avec une pantomime sublime, car il pleurait de vraies larmes, il fit la scne potique qu'il voulait peindre. Mon fils! mon fils! mon pauvre enfant! Il est mort. Le voil, mon ami, le voil! Ah! mon Dieu, ah! mon Dieu, mon pauvre Dodo, mort! L, voil sa chaise, ses babils, ses livres. Oh! mon Dieu! Voil la nature, monsieur, voil ma posie. Cette scne tait attendrissante au plus haut degr. Maintenant je vais vous lire mes vers, dit-il. J'attendais avec impatience cette offre, sachant l'admirable talent de lecture du pote. Combien pouvez-vous me donner de temps? dit-il.--Jusqu' trois heures et demie; la voiture de Caillat m'attend cette heure.--Ah! mon Dieu! quel malheur! Ah! mon Dieu! je ne pourrai pas vous lire Francounette,--ni l'Aveugle du Castel-Cuill non plus! Quel malheur! En ce moment, entre un tranger. Je suis de ce pays, monsieur, mais j'habite Genve, et dans cette ville tout le monde me parle de vous, on m'en veut de ne pas vous connatre.--Vous tes d'Agen? dit Jasmin.--Non pas, mais de S.... Alors Jasmin de lui serrer la main, de lui parler gascon, mais sans le faire asseoir et sans le retenir.--L'tranger partit bientt. A nous donc! s'cria Jasmin; qu'est-ce que je vais vous lire? Ah! mon Dieu, quel dommage une vous ayez si peu de temps!--quel malheur de ne pas lire l'Aveugle!--Ah! monsieur, c'est si touchant, si beau! cette pauvre fille qui meurt frappe de Dieu au moment o elle allait se tuer elle-mme! vous verrez, vous verrez! Et il feuilletait son livre, ravi chaque pice qu'il voyait; et il s'arrta enfin celle-ci: A un riche Agriculteur qui sans cesse l'invitait aller s'tablir Paris, o il ferait fortune. Suivez sur la traduction franaise qui est en regard, me dit-il, et vous me comprendrez; et arrtez-moi la o vous ne sentirez pas le mot gascon. Et il lut dlicieusement cette pice: Et bous tab, Moussu, sans cregne De troubla mous jours et mas neys M'escribes de pourta ma guittaro et moun pegne Dins la grando bilo des Reys!... Et vous aussi, monsieur, sans craindre De troubler mes jours et mes nuits, Vous m'crivez d'aller porter ma guitare et mon peigne Dans la grande ville des Rois!... Il terminait cette lecture entrecoupe de remarques, de commentaires et des lans de la plus nave et de la plus charmante satisfaction, lorsqu'un second tranger entra. C'tait un jeune lion parisien gar dans cette Lombardie, de la Garonne; il tenait en laisse un chien d'arrt magnifique, dont il tait aussi fier qu'embarrass; il venait videmment pour voir Jasmin, dont le nom se trouvait sur son agenda dans le Lot-et-Garonne.--Ce mlange de posie et de pommade parut l'branler. Je voudrais, dit-il en balbutiant, faire faire ma barbe. Et comme si un remords l'et saisi propos de cette barbe trs-problmatique sur son menton si jeune; Ou me faire couper les cheveux, ajouta-t-il. Jasmin paraissait dsespr. Je suis vous, monsieur, dit-il; et il allait prendre des ciseaux... Il me faisait, avec des haussements d'paules et des yeux terribles, la pantomime du drang et de l'ennuy... Quant au jeune lionceau, il ne tenait gure au reste de la chose; il avait vu Jasmin, son but tait rempli, il pouvait dsormais en parler dans le monde, ce qui lui suffisait.--Aussi billait-il dj. Jasmin sentit la chose, Mon Dieu, monsieur, je suis occup; seriez-vous assez bon pour revenir dans une demi-heure?--Tout fait, dit le jeune homme, Et il sortit avec son chien. Quel bonheur! s'cria Jasmin. Vous avez encore du temps, n'est-ce pas? Ma femme, va donc prvenir Caillat, et voir si la voiture retardera son dpart? Maintenant, monsieur, je vais vous lire une pice bien jolie; voyez-vous, c'est le cur qui l'a faite: c'est la Caritat. Suivez, suivez bien, et arrtez-moi si vous ne comprenez pas. Il est impossible de rendre la manire enchanteresse avec laquelle Jasmin fit cette lecture;--il tait vivement mu.--Son motion passa bien tt une sorte d'exaltation de lui-mme qui avait sa grandeur, Monsieur, disait-il, mes vers ont aussi leur puissance de charit; avec eux, avec mes lectures publiques, j'ai fait donner plus de 40,000 fr. aux pauvres ou d'autres uvres. Il y a un clocher qui s'lve, et il porte mon nom; c'est le Clocher Jasmin, parce que c'est moi qui ai pu en procurer l'argent avec mes vers. Il vous aurait fallu voir quel accueil, quel enthousiasme Bordeaux, Auch, Toulouse! et Paris, monsieur, comme ils m'ont reu! Vous disiez tout l'heure que mon mrite tait dans mon originalit; M. Villemain, le ministre, me l'a dit aussi dans sa lettre o il m'annonce cette belle pension qu'il m'a donne (et il prononait ces mots: Belle pension, avec un accent aussi plein de fiert que de gratitude). Et le roi, il m'a appel chez lui, et il m'a combl de bonts; et les salons de Paris se disputaient mes lectures; l'tranger lui-mme parle de moi; au milieu de ces journaux, voici un journal anglais qui me traduit et me nomme un des premiers potes de la France; combien d'autres de vos grands auteurs me le disent aussi! et Sainte-Beuve, et Charles Nodier, comme ils me protgent! comme ils m'aiment! Ainsi se dveloppait cette autre face de l'esprit de Jasmin. C'tait cette satisfaction exalte de lui-mme, ce que tout le Midi, en l'admirant, lui reproche, ce qu'on appelle sa vanit. Sans doute Jasmin a quelque chose qui ressemble la vanit, mais qui est bien plus pur et plus noble qu'elle; il me semble que son caractre s'en grandit. Cet orgueil est si naf, et d'ailleurs si justifi. Eh quoi! voici un homme n dans la pauvret, dont tous les parents sont morts l'hpital, comme il l'a dit, chant et fait graver en tte de ses livres; c'est un obscur coiffeur, et soudain le pote se rvle en lui, le Midi s'tonne et admire; sa nation l'exalte, les grands potes arrivent lui, et le nomment leur gal; les pauvres l'implorent, et l'or pleut et tombe parce qu'il dit ses vers; la religion s'adresse lui et lui demande un difice, et ses vers le lui donnent;--Bordeaux la magnifique l'applaudit;--Auch lui vote une coupe admirable de vermeil avec les mots: Jasmin, la ville d'auch, admiration, gratitude;--Toulouse, qui a son Capitole et ses ftes antiques, lui fait un triomphe et lui dcerne des lauriers en or;--le duc d'Orlans lui donnait une bague de diamants et lui avait rserv, dit-on, une faveur plus grande encore;--la duchesse d'Orlans, lui envoie une mdaille d'or avec ces mots: la duchesse d'orlans au pote jasmin;--Paris l'appelle et l'enivre de ftes et de triomphes;--Le roi lui-mme le reoit aux Tuileries, l'entend, et lui fait un prsent royal;--toute la haute littrature lui dcerne des titres de gloire, et vous voulez qu'au milieu de ce dlire cet homme simple, franc, pote prenne un semblant de fausse modestie et se dprime lui-mme! Enfin il y a un mot de Jasmin charmant de modestie et qui dtruit ce reproche de vanit mauvaise: c'est lorsqu' Paris, au milieu de ses triomphes et lorsqu'on voulait l'y retenir, il rpondit: Il faut partir, les barbes poussent Agen! Puis-je vous lire une troisime pice de vers? nous avons le temps, Cuillat attendra. Il ajouta: M. Durand tait un ange de charit, un saint de bienfaisance. Hlas! les villes et les hommes oublient vite. Un monument manque sa tombe; mais, si Dieu le permet, il s'y lvera un jour. Et il me lut la pice dlicieuse intitule le Mdecin des Pauvres. Il avait fini, et j'tais encore sous le charme de sa posie et de son dbit.--Je le regardai, des larmes taient dans ses yeux; je lui pressai la main avec attendrissement;--je ne pouvais louer autrement son uvre. Avant de le quitter, je le priai de me montrer ces prsents de villes et de princes qui lui avaient t donns. Il m'emmena dans une nice place au fond de sa maison; et d'abord il ta d'une cloche de verre la coupe de vermeil offerte par la ville d'Auch. Cette coupe, d'un travail exquis et qui semblerait sortie des ateliers d'un Cellini, est d'une hauteur de vingt-cinq centimtres environ. Il me fit remarquer l'inscription si honorable: A JASMIN, LA VILLE D'AUCH, GRATITUDE. Puis il ouvrit un trs-grand crin de maroquin vert, et il en tira d'une couche de satin blanc une double branche de laurier feuilles de grandeur de nature et d'or massif. La grandeur de cette branche d'or peut tre de quarante quarante-cinq centimtres. Dans un autre crin taient trois mdailles, sur l'une d'elles, en or, taient crits ces mots: la duchesse d'orlans au pote jasmin. Puis une bague donne par le duc d'Orlans son passage Agen. C'est un saphir entour de deux gros brillants. Enfin, il tira de son sein une belle montre en or, avec une chane de mme mtal; sur cette montre taient gravs ces mots: DONNE PAR LE ROI. Le temps me pressait;--je lui demandai une dernire grce, c'est d'avoir de sa main, sur l'un des volumes de ses posies que j'emportais, ces deux vers de la pice de la Charit: Car es amer de la recebre Aoutan qu'es dous de la donna! Il prit le volume et s'apprta avec une sorte de mditation crire quelques mots. Ce ne sont pas des vers, dit-il en me le rendant; lisez, ou plutt je vais vous traduire cette phrase. Je l'coutai, et je fus profondment attendri en entendant ces mots, dont je n'aurai pas le courage de donner ici la traduction; A Moussu G... C... A heyre commo m'abs sentit quand legissioy, bzi que mous libres n'an jamay estat dbat un nullou co, et dins de tan bounos mas, JASMIN. Agen, 6 octobre 1843. Il ignorait encore qui j'tais aprs avoir crit cette phrase, et il me le demanda pour l'ajouter aux mots; moussu, suivis d'une demi-ligne blanche. Ce fut alors seulement qu'il sut et qu'il crivit mon nom:--G... C.... Avant de nous quitter, il ouvrit un de ses volumes, et, me montrant une page de musique, il me chanta une mlodie qui est de lui, et qu'il a compose pour une de ses posies.--Sa voix est touchante, et je savais d'ailleurs qu'il tait bon musicien et jouait fort bien de la guitare. Enfin, je lui fis mes adieux, avec l'espoir et sa promesse de le revoir Paris. Histoire de la Semaine. Quand les vnements politiques intrieurs font dfaut la presse, la polmique vient y suppler, et parfois aussi elle amne ses vnements. Toute la semaine dernire, une lutte trs-vive s'tait engage dans les journaux entre des membres du haut clerg et des dfenseurs de l'Universit, qui ne parat pas encore s'tre arrte sur le meilleur moyen de se dfendre elle-mme. M. le cardinal-archevque de Lyon, M. l'vque de Langres, et l'vque de Chlons, y ont successivement pris part. Tous rclament la libert de l'enseignement, et, pour en dmontrer la ncessit, entreprennent de prouver que l'enseignement universitaire ne prsente pas aux pres de famille de suffisantes garanties morales. Les dfenseurs de l'enseignement par le gouvernement prouvent de l'embarras pour repousser ces accusations, quelque peu fondes qu'elles soient, car M. le ministre de l'instruction publique leur a donn crdit en sacrifiant des professeurs approuvs par l'Universit, mais mal vus et dnoncs par le parti ecclsiastique. Une nouvelle et rcente mesure prise l'occasion de M. le professeur Ferrari, immdiatement aprs un succs clatant remport par lui dans un concours d'agrgation, est venue donner confiance aux adversaires de l'Universit et porter le dcouragement dans les rangs de ses soutiens. D'un autre ct, la promesse d'une loi faite par la Charte de 1830, promesse dont l'excution a t ajourne d'anne en anne, semble mettre l'autorit dans une situation un peu fausse pour faire excuter dans toute leur rigueur les dispositions encore en vigueur sur les petits sminaires. C'est dans ces circonstances que la lutte, qui, dans le silence, avait t incessante, s'est traduite en lettres pastorales et en lettres aux journaux. Le Journal des Dbats avait annonc que celle de M. l'vque de Chlons, qui n'a peut-tre pas toute la gravit du caractre religieux de son auteur, tait dfre au Conseil d'tat, non pas pour la question de got, mais pour celle de lgalit. C'tait, ce qu'il parat, l'avis de M. le grand-matre, qui, pour se donner du courage, avait livr sa rsolution la publicit. Mais il a rencontr de l'opposition de la part de M. le garde-des-sceaux, et sa dtermination n'a pas t la plus forte. Le conseil-gnral de la Seine a clos le 30, minuit, sa session annuelle, dont nous avions prcdemment annonc l'ouverture. Il lui a fallu, en treize sances, arrter un budget de cinquante millions et donner son avis motiv sur une foule de questions importantes. Les sessions des conseils-gnraux sont infiniment trop courtes; beaucoup de ces assembles ont exprim des plaintes ce sujet; le conseil-gnral de la Seine l'a fait sentir de son ct, en dclarant n'avoir le temps de rpondre des questions que le ministre lui avait poses. Il a renouvel ses vux de l'an dernier relatifs la publicit donner la liste du jury et l'attribution du produit des droits d'enregistrement sur les brevets d'invention. Il a montr tout la fois de la largesse dans les sacrifices qu'il a regards comme utiles et bien entendus, et une svre conomie dans les dpenses, qu'il n'a pas considres comme suffisamment justifies. Les traitements de quelques fonctionnaires s'en sont mal trouvs. A l'extrieur s'offre toujours, sur le premier plan, l'Irlande, ou bien plutt l'Angleterre; car on est bien plus embarrass deviner comment sir Robert Peel sortira de l'impasse o il s'est engag, qu'inquiet du sort d'O'Connell et de ses coaccuss. A Londres comme Dublin, on a rpandu, la fin de la semaine dernire, le bruit que les poursuites taient abandonnes. Cette nouvelle tait absurde: mais elle n'a en cours que parce qu'elle l'tait infiniment moins que les poursuites elles-mmes. Si on ne les abandonne pas, on songe du moins les ajourner le plus possible. Au lieu des derniers jours de novembre, les premiers jours de janvier arriveront, dit-on, avant que les dbats judiciaires s'ouvrent. On semble esprer que l'avenir et l'imprvu apporteront une solution une difficult qu'on commence reconnatre inextricable aujourd'hui. On songe recommencer l'enqute entreprise, qui, entache d'irrgularit et d'vidente inexactitude, fournirait des armes redoutables un lgiste et un procdurier de la force d'O'Connell. En un mot, on croit avoir tout gagner perdre du temps. En attendant, les tmoignages de sympathie, les adhsions l'association et les offrandes arrivent au chef du rappel de la part de prlats qui jusqu'ici taient demeurs en dehors de l'agitation nationale; des prires sont faites dans toutes les paroisses de l'Irlande, et la formule de l'une d'elles nous parat assez nouvelle dans la liturgie: Puissent les amis de la libert ne jamais avoir affaire d'autres ennemis que Peel, Sugden, Wellington et compagnie!--L'Espagne mrite de plus ou plus l'pithte de malheureuse qu'on lui a tant de fois donne depuis trente-cinq ans, quand on a eu raconter les vnements dont elle a t continuellement le thtre. Barcelone et Girone, l'heure o nous crirons, sont peut-tre en feu ou dj en cendres. Les dernires nouvelles annonaient que les bombes des assigeants se succdaient sans interruption, nombreuses et terribles, que les murailles s'croulaient, et que le carnage tait imminent.--La France, qui a vu une premire fois son consul conjurer les dernires rigueurs contre Barcelone de la part d'Espartero, avec le gouvernement duquel elle tait dans des termes plus que froids, la France n'a-t-elle donc rien pu obtenir d'un gouvernement qui se dit son ami? Si elle n'y a pas russi, il faut le dplorer; mais si elle ne l'avait pas mme tent, il faudrait le dplorer plus encore. A Madrid, en prsence de pareils vnements, les Corts sont demeures trs-longtemps se constituer, et un projet de loi pour dclarer la majorit de la reine est jusqu'ici la seule mesure qui leur ait t prsente. Peut-on raisonnablement attendre de son adoption la fin des malheurs de la Pninsule: Nous le dsirons beaucoup, tout en l'esprant bien peu.--Athnes a perdu de sa confiance dans la franchise de l'adhsion du roi la rvolution de septembre. Un aide-de-camp d'Othon, qui avait vu ces changements politiques avec beaucoup de dpit, est arriv faire croire ce monarque qu'une contre-rvolution devait clater une belle nuit; car, en Grce, c'est toujours la belle toile que les mouvements s'oprent. La crdulit du prince, les ordres qu'elle lui a suggrs, ont donn penser qu'il avait une grande confiance dans les ennemis de la rvolution et trop peu de foi dans son avenir pour en tre un partisan bien sincre. Cette dfiance ne facilitera rien, et tt ou tard les puissances voudront venir en aide des embarras qu'elles pourront bien accrotre encore par l'intervention de leurs diplomates.--Les nouvelles de Chine n'ont gure apport que des dtails sur l'trange crmonial observ par les grands dignitaires du pays dans leurs rencontres avec les chefs anglais; mais ces programmes ont leur importance en ce qu'ils font voir que les Chinois ont renonc leur ancienne prtention d'humilier les Barbares, et qu'ils sont rsigns aujourd'hui les traiter d'gal gal. Nous saurons plus tard si les prsentations l'empereur n'amneront plus ces complications d'tiquette qui ont fait reculer toutes les prcdentes ambassades. L'expdition anglaise a sans doute contribu pour beaucoup ce rsultat; mais on doit croire aussi que les progrs des missions catholiques n'y sont pas tout fait trangers. Dans un rapport officiel publi Londres, nous voyons qu'on compte 52,000 catholiques dans le vicariat apostolique du Sut-Chuen, 40,000 dans celui de Fokien; Chensi et Hon-Kouang, 60,000; Tche-Kiang et Kian-Li, 9,000; Pegu et Ava, 6,000; Siam, 8,000; Malaca, 6,000; Cochinchine, 80,000; Tong-King oriental, 160,000; dans le diocse de Nang-King, 40,000; dans celui de Macao, 52,000, et dans le vicariat apostolique du Tong-King occidental, 180,000. La nature a un peu fait relche cette semaine, et n'a pas continu cette srie de tremblements de terre et de temptes que nous avions eu prcdemment enregistrer. Mais l'industrie a fourni son sinistre. Le bateau vapeur le Clipper, faisant la navigation entre Bayousara et la Nouvelle-Orlans, au moment o il quittait le port, a fait explosion par l'clat de ses chaudires, Toute la machine, de grands dbris de chaudires d'normes fragments de bois, un multitude d'autres objets, et, au milieu de tout cela, des tres humains, tous plus ou moins mutils, ont t lancs dans les airs. En atteignant sa plus grande hauteur, cette ruption a t projete, comme les jets d'une fontaine, dans plusieurs directions, et est retombe sur la terre, sur les toits des maisons et jusqu' 200 mtres de distance du lieu du sinistre. Les malheureuses victimes ont t brles, crases, dchires, mutiles et disperses de toutes parts, les unes dans la rivire, les autres dans les rues, d'autres sur l'autre rive du Bayou, prs de 250 mtres. Quelques corps ont t coups en deux par des morceaux de bois, et d'autres lancs comme des boulets de canon contre les murailles des maisons. Toute la partie des difices environnants semble avoir t ravage par un tourbillon. Le lieu du dsastre offrait un spectacle qu'il faut renoncer peindre. Les planchers des deux chambres taient jonchs de morts et ......Buy Now (To Read More)

Product details

Ebook Number: 39436
Author: Various
Release Date: Apr 12, 2012
Format: eBook
Language: French

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